L'ATELIER D'ECRITURE

 

 

V. LA REDACTION

 

 

A présent, vous avez en main tous les éléments nécessaires à la construction et la compréhension de votre histoire. N'oubliez pas que si votre plan est suffisamment précis et détaillé, votre rédaction en sera grandement facilitée. A l'exception des one-shots (histoires en un seul chapitre), j'ai toujours besoin d'un plan "paragraphe par paragraphe" avant de me lancer dans la rédaction. Lorsque j'écris, chaque mot est investi d'une importance propre qui parfois anticipe sur la suite de l'histoire, à plusieurs chapitres d'intervalle. Il m'est donc nécessaire de connaître mon intrigue dans ses moindres détails, pour savoir je vais et comment j'y vais.

 

Cette avant-dernière étape consiste à "mettre en discours" votre scénario, c'est-à-dire à concrétiser la fiction et le récit par des mots, des phrases et des figures de style. Pour ce faire, vous avez à votre disposition les procédés rhétoriques et stylistiques qui, selon la manière dont vous les utiliserez, feront de votre histoire quelque chose d'unique.

 

N'oubliez pas : votre écriture, votre style sont votre "vitrine". Il m'est arrivé plus souvent que de raison d'abandonner la lecture d'une histoire après seulement quelques lignes parce qu'elle était mal écrite. Bien sûr, l'appréciation du style d'un auteur reste subjective et étroitement liée aux goûts personnels du lecteur. Vous serez cependant d'accord avec moi que des phrases mal construites, une expression maladroite et des fautes d'orthographe et de grammaire à chaque ligne feront fuir tout le monde. Et non, la liberté d'expression n'est pas synonyme de relâchement intempestif et systématique du langage.

 

Soigner son écriture, c'est faire preuve de respect envers son lecteur, mais c'est aussi lui transmettre une partie du message de votre histoire. Tout, jusqu'au choix des mots et des expressions, aura une incidence sur la manière dont le lecteur percevra votre histoire.

 

 

A/ Conseils matériels

 

Etant donné que vous allez publier vos textes sur le net, quelques conseils de mise en forme s'imposent :

 

- Ne choisissez pas de polices trop originales ou illisibles. Certaines sont certes très jolies, mais fatiguent considérablement la lecture au bout de dix lignes. Préférez des polices classiques telles que Times New Roman ou Arial. Ne changez pas de taille et de couleur en cours de route ; ce genre de fantaisie peut être très mal pris par vos lecteurs et n'apportent rien à l'histoire.

 

- Soignez la présentation du texte. Détachez les titres du corps du texte, revenez à la ligne après chaque paragraphe et sautez-en une, voire plus, à la fin de chaque partie. Aérez votre texte ! Un amas continu de mots et de phrases rebute facilement vos lecteurs ; ce n'est pas à eux de faire l'effort de recomposer la structure de votre histoire.

 

- Les passages dialogués seront séparés du récit et signalés par un tiret (-). Evitez les présentations théâtrales du genre : "Nom : blabla…", sauf si vous écrivez une pièce. Apportez un soin particulier aux dialogues. Ce sont eux qui reflètent en grande partie le caractère de vos personnages ; il vous faudra capter la façon qu'a chacun de s'exprimer.

 

- N'introduisez pas vos parties et sous-parties par des titres : vous ne faites pas un plan, vous rédigez !

 

- Si vous citez des titres, ceux-ci apparaîtront en italique : Madame Bovary, de Flaubert. Veillez également à leur exactitude et évitez les parenthèses désagréables telles : "j'ai oublié le titre exact, je chercherai plus tard". Cherchez maintenant !

 

- Les citations sont mises entre guillemets, et si possible rendues à leurs auteurs originaux. Dans le cas contraire, vous vous rendez coupables de plagiat.

 

- Développez les abréviations et surtout, bannissez systématiquement celles utilisées dans les discussions en ligne ("g" pour "j'ai", "MDR" pour "mort de rire", etc.) ainsi que les émoticons (^_^ -_- >_<). Si vos personnages ressentent une émotion, décrivez-la en faisant une phrase.

 

- N'abusez pas de signes fantaisistes pour indiquer les pensées des personnages. Elles font partie de votre texte, intégrez-les donc en tant que telles. Au pire, mettez-les en italique si vous craignez que vos lecteurs n'y fassent pas attention.

 

- Les chiffres et les nombres doivent être écrits en toutes lettres : un, dix-sept, mille, etc. Seules les dates peuvent être laissées telles quelles : 15 août 2003, XXe siècle.

 

- La ponctuation :

 

La virgule (,) équivaut à une brève respiration entre les éléments d'une énumération ou pour mettre en valeur des propositions.

Le point-virgule (;) est une pause moyenne entre deux éléments liés par le sens.

Le point d'interrogation (?) clôture une question, tandis que le point d'exclamation (!) souligne des émotions fortes.

Les guillemets (") sont utilisés en début et en fin de citation.

Les deux points (:) introduisent une explication, ou permettent d'alléger la phrase à la place d'un subordonnant.

Les trois points de suspension (…) indiquent que la phrase n'est pas achevée.

Une fois ouvertes, les parenthèses ( ) doivent être refermées.

 

Note 1 : On laisse un espace avant et après (;) (?) (!) (:)

 

Note 2 : le tiret s'intercale entre les mots lorsque le sujet est inversé : mange-t-il assez ? ne confond-on pas ?

 

- Les règles de l'élision :

 

N'écrivez pas                                      Ecrivez

l'héros                                                 le héros

le huissier                                            l'huissier

parce que il                                         parce qu'il

si il                                                      s'il

 

- Pour les fanfictions : avant la fic proprement dite, indiquez de façon claire et succincte votre nom de plume et adresse email ; l'œuvre dont vous vous êtes inspiré ; le genre et les éventuels avertissements ; le disclaimer (ou démenti rendant la propriété de l'œuvre originale à son auteur légitime). Soyez bref ; vos lecteurs ne s'amuseront pas à lire des introductions d'une page et sauteront directement à l'histoire – dans le meilleur des cas.

 

 

B/ Le style

 

- Gardez près de vous un dictionnaire de langue française lorsque vous rédigez, voire un dictionnaire des synonymes. Cela vous épargnera bien des désagréments et hésitations.

 

- Enrichissez votre vocabulaire : la langue française comporte suffisamment de mots pour que vous parveniez à trouver celui qui signifiera exactement ce que vous voulez dire. Ne vous contentez pas d'approximations, mais allez toujours au plus précis. N'accumulez pas les mots vides de sens tels que dire, faire, être, avoir, etc.

 

- Evitez enfin les expressions à la mode et la transcription directe du langage parlé, dont la portée est éphémère. La force d'une histoire est son intemporalité, c'est-à-dire sa capacité à demeurer valable et compréhensible quelle que soit l'époque.

 

- Ecrivez en français ! N'insérez pas à tout bout de champ des expressions en anglais ou en japonais sous prétexte que les personnages parlent ces langues dans la version originale.

 

- Les figures de styles : usez-en, mais n'en abusez pas, auquel cas votre texte deviendrait confus et sibyllin. Manipulées à bon escient, elles feront la richesse et l'originalité de votre écriture.

 

1/ Images :

 

comparaison : établit un rapprochement entre deux termes (le comparant et le comparé) à partir d'un élément commun et grâce à un outil grammatical (comme, pareil à, tel que, ressembler à, etc.)

ex : la nuit était pareille à un manteau de velours

 

métaphore : assimile deux termes sans l'aide d'un outil grammatical.

ex : la mer d'oliviers (pour les champs d'oliviers)

 

allégorie : représente de façon imagée les divers aspects d'une idée.

ex : les doux refrains de la mémoire me susurraient une ancienne chanson (pour évoquer des souvenirs lointains et agréables)

 

personnification : représente une chose ou une idée sous les traits d'une personne.

ex : la Justice, représentée sous l'apparence d'une femme aux yeux bandés

 

2/ Substitutions :

 

métonymie : remplace un mot par un autre mot qui lui est lié par un rapport logique net (cause / effet, contenu / contenant, tout / partie).

ex : une fine lame (pour un escrimeur), un Zola (pour un livre de Zola)

 

synecdoque : remplace la partie par le tout, le tout par la partie, le genre par l'espèce, l'espèce par le genre, etc. (rapport d'inclusion).

ex : les voiles (pour le bateau)

 

périphrase : remplace un mot par une expression formée de plusieurs mots et de sens équivalent.

ex : la messagère du printemps (pour l'hirondelle)

 

3/ Oppositions :

 

antithèse : oppose très fortement deux termes afin de mettre en relief l'un des deux (ou les deux).

ex : grand jusque dans les plus petites choses

 

antiphrase : exprime une idée par son contraire dans une intention ironique.

ex : quelle réussite admirable ! (pour dire que c'est un échec complet)

 

paradoxe : va à l'encontre de l'opinion commune afin de surprendre, choquer, ou inviter à la réflexion.

ex : se moquer de la philosophie, c'est vraiment philosopher (Pascal)

 

oxymore : deux termes évoquant des réalités contradictoires sont réunis dans une même expression.

ex : soleil noir

 

4/ Amplification et atténuation :

 

hyperbole : exagère l'expression afin de mettre en valeur un objet ou une idée.

ex : Jusqu'au fond de nos cœurs, notre sang s'est glacé. (Racine)

 

anaphore : répète un même mot ou groupe de mots en tête d'une succession de phrases ou de propositions.

ex :       Il n'y a pas d'amour qui ne soit à douleur

            Il n'y a pas d'amour dont on ne soit meurtri

            Il n'y a pas d'amour dont on ne soit flétri (Aragon)

 

gradation : ordonne les mots dans une succession croissante.

ex : Va, cours, vole, et nous venge. (Corneille)

 

anacoluthe : met en valeur un énoncé par une rupture de construction syntaxique.

ex :       Mais, seule sur la proue, invoquant les étoiles,

            Le vent majestueux qui soufflait dans les voiles

            L'enveloppe. (André Chénier)

 

litote : dit le moins pour suggérer le plus.

ex : Va, je ne te hais point. (Corneille)

 

euphémisme : atténue l'expression d'une idée, d'un sentiment lorsqu'ils sont jugés trop crus ou déplaisants.

ex : il est parti (pour il est mort)